Face à la crise sanitaire du Coronavirus et ses impacts sur les nombreux pans de la vie économique du pays, certaines communes s’interrogent sur l’opportunité de suspendre ou réduire certaines taxes en vue de soutenir les commerçants.
Certaines villes et communes wallonnes ont d’ailleurs déjà franchi ce pas en optant, tantôt pour une réduction des taxes liées à l’activité économique (débits de boissons, terrasses, taxes sur les séjours, …), tantôt pour un moratoire sur la perception en 2020 de certaines taxes applicables à la totalité de leurs citoyens.
Vous souhaitez vous engager dans une démarche similaire ? Pas de précipitation ! Nous avons compilé ci-dessous quelques conseils dont une bonne partie relève du bon sens, mais qui pourraient toutefois être fortement utiles en cette période d’urgence.
# 1. N’hésitez pas à conscientiser les autorités politiques de votre commune sur le fait que le Directeur financier / receveur régional est le conseiller financier de la commune et qu’il est impératif que le Collège le consulte avant toute prise de décision susceptible d’avoir un impact sur les dépenses / recettes de ladite commune. Il en ira de même avant de faire la moindre suggestion au Conseil communal allant dans un sens similaire.
# 2. Avant de prendre différentes décisions relatives à d’éventuelles réductions de taxes ou d’instauration d’un moratoire relatif à leur perception, il convient de se poser les bonnes questions :
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L’ampleur réelle et la durée de cette épidémie peuvent-elles être définies précisément ?
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D’autres mesures devront-elles encore être adoptées dans les semaines / mois qui viennent (amplification des fermetures de commerces, confinement de la population, fermeture des services publics, …) ?
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Les effets économiques de ces mesures sont-ils déjà connus ?
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Une intervention des autres niveaux de pouvoir a-t-elle une chance de survenir dans le futur et quelles en seraient les modalités
# 3. Il convient de garder à l’esprit qu’il est encore difficile d’estimer l’ensemble des conséquences qu’aura cette épidémie et qu’il convient de mesurer l’impact que vos décisions auront sur les finances communales, et par effet domino sur les moyens que les communes pourront dégager pour aider les citoyens. Les communes n’ont en effet pas, à la différence d’autres niveaux de pouvoir, la possibilité de recourir à l’emprunt pour couvrir un déficit du service ordinaire. Un tel déficit serait la conséquence directe d’une prise de décision par la commune de renoncer ou retarder l’enrôlement des taxes. Les communes doivent par ailleurs assurer l’équilibre de l’exercice propre sous peine de se voir imposer des mesures contraignantes (plan de convergence, …). Les recettes fiscales communales ayant par ailleurs pour objet de financer les missions de service public, une limitation de ces recettes pourrait avoir un lourd impact sur ces missions en question.
Si toutefois, vous décidiez de vous engager dans une telle démarche, il convient par ailleurs de garder à l’esprit ces quelques éléments de droit :
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La décision d’une réduction de taxe non prévue par le règlement appartient au Conseil communal et non au Collège. Cette décision pourra être prise, via une modification du règlement en question ou éventuellement via une mesure de libéralité conforme à l’article 1222-2 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (par extension applicable à la matière des taxes). Dans tous les cas de figure, les réductions qui seraient accordées par le Conseil communal doivent se baser sur des critères objectifs et être conformes aux principes d’égalité et de non-discrimination.
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L’éventuel moratoire qui sera décidé ne pourrait concerner que l’application du règlement, et donc l’enrôlement de la taxe, mais sans que cela puisse modifier les délais d’enrôlement légaux qui resteraient applicables (dont notamment la limite du 30 juin de l’année qui suit l’exercice d’imposition prévue par le CDLD).
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S’il vous optiez pour un moratoire de perception, la taxe ayant déjà été enrôlée, là aussi, d’un strict point de vue légal, il convient de rappeler que les délais de paiement d’une taxe sont des délais d’ordre public auxquels le collège ne peut déroger. Seul le Directeur financier pourrait aménager les poursuites sous sa responsabilité, sans lui-même pouvoir déroger au délai légal. La seule solution légalement envisageable serait donc que le Collège indique à son Directeur financier qu’il ne mettra pas en cause la responsabilité de ce dernier s’il ne fait pas le nécessaire pour faire rentrer les recettes selon les délais légaux et invitera le Directeur financier à aménager les rappels et les poursuites de sorte que les redevables disposent de plus de temps pour payer et à accepter plus souplement les demandes de plan de paiement.
Pour en savoir plus sur la modification ou l’approbation de l’impôt communal, les Éditions Vanden Broele vous conseille l’ouvrage de Marc Levis «Les impôts communaux - A. Généralités et recouvrement ». Cet ouvrage est consultable sur votre plateforme FinancesConnect :https://myportal.vandenbroeleconnect.be/fr-be/contenu/livres/detail/73184593456473623/les-impots-communaux-a-generalites-et-recouvrement#73186792479882111